Spark New Zealand : une transformation agile à grande échelle.

Les baroudeurs de l’innovation sont partis chez Spark New Zealand, anciennement Telecom New Zealand, une entreprise de télécommunication et de téléphonie mobile néozélandaise. Elle est implantée sur l’ensemble du pays et compte aujourd’hui plus de 5000 collaborateurs. Depuis 2015, Spark New Zealand a entamé une transformation majeure de son modèle managérial dans le but de devenir agile en adoptant la méthode SCRUM. Pionnier du renouveau pour certains, catastrophe annoncée pour d’autres, nous sommes allés en discuter avec Chris, coach en agilité chez Spark.  

A plusieurs reprises, l’entreprise Spark était citée dans nos discussions avec les locaux au sujet des organisations à visiter à Wellington. La transformation agile effectuée depuis 2015 avait en effet provoqué de nombreux débats, non seulement parce que l’entreprise était une des premières à faire le pari de l’agilité pour améliorer sa performance, mais également parce que cette transformation était envisagée à grande échelle et concernait la majorité des employés, exceptée toute la partie exécutive en magasins. Une fois de plus, nous passons par LinkedIn pour tenter de trouver un entretien et ça marche ! Quelques jours plus tard nous sommes dans les locaux principaux de Spark New Zealand en plein cœur de Wellington.

Ce qui nous interpelle

2015 : tournant managérial amorcé

Une transformation impulsée par le top management : 

La nécessité du changement chez Spark tenait à la volonté de se moderniser, de changer les méthodes de travail pour faire en sorte que les clients, ainsi que les employés soient plus satisfaits. Les leaders de Spark ont alors choisi de faire appel à un cabinet de conseil qui leur a conseillé de mettre en place la méthode agile SCRUM, une tendance très en vogue chez les géants. Pionnier en Nouvelle-Zélande, Spark a donc choisi de la tester progressivement. 300 personnes du département logistique situées à Auckland l’ont expérimentée en 2015. Il s’agissait donc de deux tribus de 150 personnes. Rapidement, la méthode a été adoptée suite aux feedbacks positifs donnés par les collaborateurs, mais peut-être était-ce trop rapide… En effet, seulement cinq jours ont été attribués à chacun pour prendre du recul sur cette transformation et donner son avis. Cette pression du temps est d’autant plus controversée que la décision allait concerner les 5000 collaborateurs de l’entreprise. Les critiques furent nombreuses vis-à-vis de cette transformation, mais comment cette dernière a-t-elle eu lieu ?  

Suite à l’approbation majoritaire des collaborateurs impliqués durant la phase test, l’ensemble de l’entreprise s’est vue plongée dans une transformation managériale « one go » comme le dit Chris. Plusieurs workshops ont cependant eu lieu au préalable afin de permettre aux collaborateurs de Spark de s’inscrire dans une nouvelle dynamique : la prise de conscience, le lancement et l’accompagnement dans la poursuite du changement.

La prise de conscience : 

Chris le souligne, c’est le psychologique et la façon d’appréhender les choses qui importent le plus dans la transformation. Il ne faut pas imposer mais faire prendre conscience. Les employés doivent comprendre, grâce à la communication des leaders et à la transparence sur les changements, les différents tenants et aboutissants de la transformation et se les approprier pour les rendre effectifs. Pour ce faire, Spark a mis en place une communication interne active par le biais, non seulement de posters, mais également de workshops et bootcamps. Chris nous évoque plus précisément le bootcamp Agile 360 tours. Il souligne l’importance de ce Bootcamp pour l’ensemble des collaborateurs de Spark. Lors de celui-ci, les collaborateurs étaient répartis par équipes de 20 à 30 personnes et ont été sensibilisés à la méthode SCRUM, les nouvelles structures d’équipe, les nouvelles façons d’interagir et d’innover… Ils ont notamment pu expérimenté ce qu’était le travail au sein d’équipes pluridisciplinaires, marque de fabrique de cette méthode.

Alors, comment sensibiliser efficacement ? Par le jeu ! Seul puis en équipe, les collaborateurs ont appris à voler par le biais d’un jeu en ligne. Seul, ils ont tous pu expérimenté les difficultés d’un apprentissage long et scabreux, alors qu’ensemble il leur a été beaucoup plus facile d’apprendre à voler. Simple et ludique, ce jeu a permis à certains collaborateurs de prendre conscience de la force du travail en équipe, organisé selon la méthode SCRUM : des interactions brèves et informelles, un feedback régulier et une ouverture aux avis et prises d’initiatives de chacun pour innover.

Le PUSH : 

Avant la transformation chez Spark, chaque collaborateur avait eu la possibilité de choisir de rester ou non dans l’entreprise. Cette période avait duré 5 semaines afin de laisser le temps aux employés de s’adapter et de tester la méthode. La priorité était de laisser à chacun la possibilité de se former à de nouvelles compétences et de s’habituer aux changements majeurs dans l’organisation quotidienne du travail.

Parmi l’ensemble des collaborateurs, un groupe de personnes particulièrement motivées et motrices pour le projet a permis de relayer plus facilement les informations, de rassurer les personnes dans le doute et de promouvoir cette nouvelle façon de procéder. Ces personnes ont été d’une importance capitale selon Chris car elles ont permis de rendre possible une transformation plus souple et plus rapide. Pour la plupart, elles sont ensuite devenues Agile coach et c’est le cas de Chris.

L’après : 

Après l’étape de transformation top-down mise en place, le plus important réside dans l’appropriation par chacun de la méthode et dans l’accompagnement proposé par l’entreprise afin de rendre cette nouvelle culture managériale pérenne. Les coachs et la plateforme de communication créée jouent un rôle primordial mais Chris souligne que Spark encourage une croissance bottom-up qui, portée par les collaborateurs, leur donne la possibilité d’améliorer quotidiennement leur environnement de travail, les méthodes utilisées et ainsi développer un sentiment d’appartenance si important dans la fidélisation et l’implication des collaborateurs.

Afin de cultiver l’esprit d’agilité nouvellement implanté et de favoriser la croissance bottom-up l’entreprise organise jusqu’à 15 Bootcamps par an au sein de la Rock’n Roll Arena situé à Auckland. Chris se souvient d’une des interventions particulièrement marquantes lors du dernier Bootcamp. Il s’agissait d’un des rugbymen de l’équipe néozélandaise iconique : les All Blacks. Il est intervenu sur l’esprit d’équipe et la façon d’appréhender l’échec. Son intervention a inspiré les collaborateurs présents, non seulement parce que ses mots ont résonné en eux, mais aussi parce que la comparaison faite entre une équipe sportive et une équipe professionnelle leur a plu. Le plus important est d’inspirer et c’est aujourd’hui exactement le rôle du leader chez Spark.

Être agile : la méthode SCRUM

Structurellement ça change quoi ?

Spark a sauté le pas et mis en place une nouvelle structure fondée sur la formation de tribus, de chapters et de squads.

  • Les tribus rassemblent entre 100 et 150 personnes du groupe et se définissent par leur champ d’action au sein de l’entreprise. La mission de chaque tribu est clairement définie et fait partie intégrante de la stratégie de développement de Spark.
  • Au sein de ces tribus on trouve plusieurs squads. Ce sont des équipes pluridisciplinaires de 8 à 12 personnes. Ces équipes sont responsables d’un produit ou service précis, de sa création à son développement. Les équipes suivent le cycle de vie du produit/service du début à la fin et mènent différents projets. Cette façon de faire diffère de celle d’ING qui fait en sorte que les équipes changent souvent et ne travaillent pas sur les mêmes produits/services. Pour Chris, s’attacher ainsi à un produit/service permet de développer un sentiment d’appartenance fort qui engage davantage les collaborateurs dans la valorisation de ce dernier.

Les squads ont toutes un leader nommé Product Owner (PO). Le PO est en charge d’accompagner l’équipe et agit tel un manager. Il guide les collaborateurs vers les priorités et assure la bonne communication entre tous.

  • Ces équipes pluridisciplinaires permettent un meilleur partage de connaissance et crée une émulation positive. Les personnes de mêmes compétences ont en outre la possibilité d’interagir ensemble via les chapters. Ces chapters encouragent le partage d’expérience et permettent aux collaborateurs d’échanger sur des problématiques en cours. Un chapter lead est nommé et devient le garant du développement professionnel de chacun. Il est également la personne en charge du recrutement car il connait parfaitement les personnes au sein des équipes, leurs compétences et peut donc ensuite planifier un recrutement selon les talents et besoins dans chaque projet.

En parallèle, les squads sont également accompagnés par la trentaine d’agile coachs présents chez Spark ainsi que par les Consumer Experience Experts. Les agile coachs aident les équipes à s’adapter à la méthode agile nouvellement mise en place, tandis que les Consumer Experience Experts partagent leur expertise et se concentrent sur l’expérience client. Spark a en effet adopté une stratégie user-centric.

Une approche centrée sur l’utilisateur

S’organiser : les sprints

Les squads s’organisent en sprints : ce sont des périodes de travail de deux à trois semaines dédiées à un projet précis. Au début de chaque sprint sont définies les tâches et les priorités du projet. Les collaborateurs doivent également estimer l’effort et le temps nécessaires à la réalisation de chaque tâche. Le but est de développer leur capacité à anticiper les besoins propres à chaque projet et d’accélérer leur réalisation.

Pour ce faire, tous les matins a lieu un meeting de quinze minutes autour du tableau Kanban réalisé au début de chaque sprint par les équipes. Ce tableau recense les tâches à accomplir durant ce sprint. Ces tâches sont classées en fonction des priorités et le tableau permet de les noter en fonction :

  • De leur importance,
  • De leur difficulté,
  • Du temps à leur consacrer,
  • Du nombre de personnes nécessaires à sa réalisation,

Le tableau est agencé selon trois colonnes : À faire, en cours ou déjà fait. Il permet de rendre compte de la progression de l’équipe et du projet et d’ajuster si besoin.

En outre, les Product Owner utilisent la data afin d’évaluer l’avancement des équipes. Cela permet de corriger les mauvaises anticipations et de mettre en place un suivi objectif d’un sprint à l’autre, d’une tâche à l’autre…

Enfin, à la fin de chaque sprint, un feedback collectif est réalisé dans chaque squad. La peer-to-peer approche est actuellement en voie de développement chez Spark. Elle permet de donner la parole à chaque collaborateur au sein des équipes sur le travail réalisé durant le dernier sprint. Il n’y a pas d’accusation personnelle mais une remise en question collective en cas de difficulté et c’est ce qui importe le plus pour Chris. En effet, il souligne que les feedbacks ne peuvent être délivrés personnellement à des collaborateurs qui ne le souhaitent pas et les techniques traditionnelles ont tendance à faire porter la faute par une personne en particulier en cas d’échec d’un projet. Cette nouvelle méthode permet de rendre les feedbacks beaucoup moins stressants et beaucoup plus constructifs pour l’équipe.

Comprendre et anticiper les besoins des utilisateurs

Lors de la définition des priorités et des tâches à réaliser, les collaborateurs au sein des squads, accompagnés par leur Product Owner, doivent agir en fonction des problèmes des utilisateurs, de leurs besoins et de leurs demandes. Pour cela deux méthodes les aident à repenser les choses :

  • La méthode JUCCI (Join User Care Change Involvment) permet de catégoriser l’expérience client et d’analyser leurs demandes et leurs problèmes. Elle permet de prioriser certaines tâches plus que d’autres.
  • La méthode UCDC (User Central Design Canvas) est un outil psychologique pour comprendre le comportement des clients. Le but est d’anticiper, de prévoir quels vont être les réactions, les besoins…. La méthode UCDC encourage les collaborateurs à avoir une attitude proactive et non réactive.

Chris décrit ces deux outils comme indispensables pour la réflexion et la mise en place de projets au sein des équipes. Spark remet ainsi l’utilisateur au cœur de sa stratégie de développement.

Des nouveaux bureaux pour une nouvelle culture managériale

Spark développe le flexoffice.

Les anciens bureaux de chez Spark étaient agencés traditionnellement et ne correspondaient plus aux besoins des collaborateurs. Ils ont donc été complètement repensés. Il s’agit aujourd’hui d’un immense openspace auquel s’ajoutent quelques salles de réunions et de collaboration cloisonnées. Chaque collaborateur peut s’asseoir où il le souhaite. Conscient que l’openspace peut générer beaucoup de bruits et des distractions, l’entreprise met à disposition des murs amovibles et déplaçables qui permettent de créer différents espaces de travail en fonction des besoins des équipes ou d’un seul collaborateur.  Ingénieux !

En plus ….

Notre ressenti

Nous sommes très intéressés par la transformation opérée par Spark puisqu’elle a touché énormément de personnes de façon très soudaine. Chris souligne d’ailleurs la difficulté d’un tel changement. Plus de temps aurait surement dû être donné aux collaborateurs des 2 tribus qui ont testé la méthode SCRUM car nous avons senti que le changement s’était fait dans la douleur pour certains salariés créant ainsi un sentiment d’incompréhension et de refus.

Spark était la troisième entreprise rencontrée ayant mis en place la méthode SCRUM. Nous regrettons que les entreprises collent à un modèle et ne cherchent pas à l’adapter et le personnaliser… Impossible que toutes rentrent dans le même moule !

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