PME BtoB : Etes-vous plutôt Mediocristan ou Extremistan ?

Un seul contrat gagné ou un seul client perdu peut changer la physionomie de la performance de votre entreprise (sans parler de l’effet Covid) ? Il vous est par ailleurs souvent difficile, voire impossible, d’établir un lien de causalité unique entre le gain (ou la perte) d’un contrat à une action particulière (marketing, commerciale ou relation clients) ? Vous avez parfois l’impression que les opportunités qui s’offrent à vous relèvent du « coup de chance » (ou sortent de nulle part, ce qui revient au même) ?

Il y a fort à parier que votre entreprise évolue en Extremistan. Dans l’excellent « Le cygne noir », Nassim Nicholas Taleb Détaille deux mondes :

  • le Mediocristan (Médiocre étant utilisé dans son acception originelle, non péjorative), dans lequel les événements sont prévisibles, les performances passées présagent des performances futures, et les liens de causalité sont relativement clairs.
  • l’Extremistan, ce monde dans lequel un seul événement, improbable, inattendu, imprévisible, peut avoir des répercussions très importantes (négatives ou positives, aka « le cygne noir »).

Dans quel monde opérez-vous ?

Votre offre est essentiellement composée de produits ou de services standardisés, peu coûteux, diffusés largement et votre performance repose sur la conquête de plusieurs dizaines, centaines ou même milliers de clients ? Il y a de forte chance que votre entreprise évolue dans le monde merveilleux du « Mediocristan ». Vos actions marketing et commerciales sont industrialisables, vos performances sont « prévisibles » et les méthodes marketing et commerciales « à volume » sont faites pour vous.

Votre offre est composée de produits ou de services sur-mesure, plutôt coûteux, diffusés auprès d’un nombre restreint de clients ? Bon, ce n’est pas grave, mais votre capacité à pouvoir anticiper et développer votre activité en vous appuyant sur des méthodes marketing et commerciales industrialisées est réduite. Vous opérez dans un monde « Extremistan ».

Or, les méthodes marketing, quoique complexes, sont finalement assez monolithiques et reposent sur la confiance en des mécanismes statistiques assez simples (par exemple : x visites donnent x contacts générant x opportunités promettant x CA) qui sont étayés abondamment dans la littérature marketing. Bref une approche très « Mediocristan ». Méthodes qui sont donc logiquement peu adaptées à l’Extremistan, incertain, peu « gaussien », peu modélisable.

Mon entreprise évolue en « Extremistan », comment faire ?

Dans une autre vie, avec le dirigeant de l’entreprise qui m’employait (en Extremistan), nous avions constaté, de façon très empirique, que la performance des collaborateurs commerciaux était très liée à leur niveau d’activité. Je ne parle pas ici (ou pas seulement) d’une activité quantifiable, processée (nb de rdv par exemple). Il ne s’agissait pas non plus d’agitation (succession d’actions désordonnées, parfois contre-productives), mais d’un corpus d’actions très diverses aux interactions complexes, portées par une ligne directrice claire, d’itérations d’essais, d’erreurs puis de corrections. Nous avions nommé cette attitude « effervescence ». Pourquoi ces commerciaux « effervescents » étaient-ils plus performants ? Cela, nous pouvions le quantifier : ils généraient plus d’interactions et d’opportunités.

C’est là le nœud de notre sujet. Un célèbre slogan disait « tous les gagnants ont tenté leur chance ». Le sujet n’est pas, en Extremistan, de se lancer à corps perdu dans des actions de prospection (la probabilité de « tomber » sur un prospect, au bon moment, avec un besoin qualifié est relativement faible), c’est de construire un système susceptible de capter des opportunités (votre chance) qui se présentent sur le marché. Et elles n’ont pas besoin d’être si nombreuses pour changer la physionomie de votre performance.

Comment rendre mon offre « effervescente » ?

1. Adopter la pensée « Extremistan »

Alors qu’en Mediocristan chaque action marketing ou commerciale peut être conçue comme un pas vers la concrétisation de votre objectif de CA, ces actions, en Extremistan doivent plutôt être approchées comme des fils que vous tissez à la toile qui servira à « capturer » les opportunités qui se présenteront. Plus elle sera tissée serrée et mieux elle sera positionnée, plus vous multipliez vos chances de générer des opportunités.
Vous continuez bien sûr à mesurer la performance de chacune de vos actions (par exemple, la performance en référencement naturel de votre site web doit vous indiquer si vous êtes susceptibles de capter l’attention de contacts que vous visez), mais vous n’extrapolez pas ces résultats (x visites = x leads = x contrats…).

2. Clarifier vos cibles

PME, vous n’avez pas les moyens d’une multinationale. Eparpiller vos ressources marketing et commerciales sur un nombre élevé de cibles c’est l’assurance de ne rien capter du tout. En Mediocristan il est aisé de « tester » des cibles potentielles, grâce à la mesure comparée de la réactivité de ces cibles à une même offre, et donc de définir ces cibles prioritaires sur la foi des résultats obtenus. Cette approche est impossible (ou en tout cas beaucoup plus difficile) en Extremistan. La faiblesse de l’échantillon statistique (nombre d’opportunités générées / nombre de contacts sollicités) ne permettant pas de tirer des conclusions robustes. La clarification de votre cible, par une autre approche, devient cruciale.

Pour cela, définissez très clairement les 2 ou 3 « Personas » auxquels s’adresse votre offre (… et excluez les autres de vos plans). Un Persona correspond à un personnage fictif qui symbolise une typologie de client, auquel vous donnez tous les attributs d’une personne réelle (prénom…). En détaillant sa situation, ses attentes, ses objectifs, ses moyens d’information, ses habitudes de consommation (etc…), vous parviendrez à imaginer les stratégies susceptibles de les attirer à vous.

3. Voir LARGE et agir étroit

Une collaboration avec votre entreprise représente un effort financier ou un enjeu important et potentiellement un engagement sur du long et moyen terme. Votre offre, au moins en partie « sur-mesure », suppose une co-conception de la solution et donc une collaboration étroite.
Sur un marché « Extremistan », l’intuitu personae est la règle (d’ailleurs le fait que la page « équipe » des sites web de nos clients sur ces marchés soit l’une des plus visitées en témoigne). Votre prospect doit donc, lorsqu’il est en relation avec votre entreprise, via vos outils de communication ou votre équipe, se découvrir une proximité avec vous. Voir LARGE, c’est prendre le risque d’adopter un positionnement clair (qui exclue donc une partie du marché), cohérent avec les personas que vous vous êtes choisis, décliné et mis en œuvre sur l’ensemble de vos points de contact. C’est ce que l’on appelle une plateforme de marque, qui n’est pas réservée aux entreprises de plus grande taille.

Comme sur ce marché la performance ne peut être mécanisée (c’est l’apanage des marchés Mediocristan), il vaut mieux éviter le surinvestissement sur des actions d’envergure et préférer la multiplication d’actions d’image et d’actions ciblées. Certaines d’entre elles ne vous apporteront pas grand-chose à court terme, d’autres généreront des succès inattendus. Toutes participeront à bâtir votre toile.
Les actions d’image sont destinées à renforcer la singularité de votre marque sur son marché et leur élaboration reposent sur l’exploitation de vos Personas.
Les actions ciblées, plus opérationnelles, nécessitent dans leur élaboration une collaboration étroite entre le marketing et l’équipe commerciale. Cette collaboration constante constitue un vrai facteur clé de succès sur les marchés Extremistan.

4. Ne rien laisser s’échapper

En Extremistan, il est rare de faire face à un flux constant et important de prospects et d’opportunités… Ce qui est rare devient rapidement précieux. Et pourtant, des prospects ou des opportunités s’échappent parfois, ou ne sont pas décelés à temps.

Parmi les priorités :

  • Le portefeuille clients : c’est une priorité absolue. D’une part parce que ce portefeuille, durement acquis, peut générer de nouvelles opportunités, à coût d’acquisition réduit, et d’autre part parce que c’est une source potentielle importante de recommandations.
  • Les influenceurs, les prescripteurs et les utilisateurs : ce sont souvent les personas « oubliés » (nous sommes souvent concentrés sur les décideurs). Pourtant, chacun d’entre eux peut jouer un rôle important dans l’émergence et la concrétisation d’une opportunité.
  • La gestion de l’information marketing et commerciale : la vente en Extremistan est complexe et fait intervenir souvent plusieurs acteurs. Une gestion cohérente, centralisée (CRM), partagée, analysée de la donnée permet d’élaborer des stratégies très ciblées, plus efficaces et au final plus frugales.

En conclusion, des méthodes marketing et commerciales éprouvées sur un marché Mediocristan s’avèreront souvent décevantes sur un marché Extremistan. Si vous exercez sur un marché Extremistan, comparer vos performances marketing et commerciales avec celles d’un collègue exerçant sur un marché Mediocristan peut s’avérer déconcertant et parfois décourageant (sous d’autres aspects la comparaison est plus flatteuse – panier moyen, fidélisation, marge). Les méthodes à déployer en Extremistan requiert un peu plus de temps pour produire du résultat, mais le système mis en œuvre se révèle la plupart du temps assez résilient et relativement frugal. Bien comprendre la nature de son business (Mediocristan ou Extremistan), c’est s’assurer de choisir les méthodes marketing et commerciales les mieux adaptées.

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